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Réélection de Paul Biya en 2025 : le Grand Nord tourne la page du RDPC ?

La réélection de Paul Biya en 2025 révèle une rupture électorale majeure avec le Grand Nord. Analyse des scénarios politiques et des enjeux régionaux.

Avec seulement 34,61 % en Adamaoua, 38,78 % dans le Nord et 45,93 % dans l'Extrême-Nord, Paul Biya signe une victoire nationale… mais une défaite régionale dans ses anciens bastions. Dans un article précédant nous évoquions cette éventualité 

 Cameroun : élection présidentielle 2025 Paul Biya perd-elle réellement le nord ?

La réélection de Paul Biya en octobre 2025, avec 53,66 % des voix au niveau national, marque un tournant politique majeur au Cameroun. Si le président conserve le pouvoir, il le fait dans un climat de contestation intense, notamment dans les régions du Grand Nord — jadis bastions fidèles du RDPC, aujourd'hui foyers d'une opposition affirmée. Les chiffres officiels parlent d'eux-mêmes : Issa Tchiroma Bakary arrive en tête dans l'Adamaoua avec 50,33 %, dans le Nord avec 43,51 %, et talonne Biya dans l'Extrême-Nord avec 42,34 %. Une rupture électorale sans précédent.

Le Grand Nord en quête d'alternative

L'Adamaoua, le Nord et l'Extrême-Nord ont longtemps été considérés comme les piliers électoraux du régime. Mais les résultats de la présidentielle 2025 et les appels à la désobéissance civile lancés par Issa Tchiroma depuis Maroua révèlent une dynamique nouvelle : le Grand Nord ne veut plus être un simple réservoir de voix, mais un acteur politique autonome. Cette mutation s'accompagne d'un rejet des élites traditionnelles perçues comme trop alignées sur Yaoundé.

Paul Biya : entre purge silencieuse et recomposition tactique

Face à cette recomposition, plusieurs scénarios s'offrent au président :

      Prendre ses distances avec les élites du Grand Nord : en les marginalisant dans les prochains remaniements ministériels ou en les excluant des cercles décisionnels, Paul Biya pourrait affaiblir leur influence sans confrontation directe.

      Recruter de nouvelles figures locales : jeunes leaders, entrepreneurs, ou figures religieuses pourraient être promus pour incarner une nouvelle génération d'alliés, plus connectés aux réalités locales et moins marqués par l'héritage du RDPC.

      Neutraliser les anciennes élites : sans aller jusqu'à une éviction brutale, le président pourrait opter pour une stratégie d'« étouffement institutionnel » : réduction des budgets, mise à l'écart dans les nominations, ou audits ciblés pour améliorer leur crédibilité.

Une reconquête par la base ?

Mais Paul Biya pourrait aussi choisir une voie plus subtile : reconquérir le Grand Nord par la base, en investissant dans des projets de développement, en relançant les programmes d'inclusion numérique, ou en soutenant des initiatives locales portées par des jeunes. Cette approche, moins frontale, viserait à restaurer la confiance sans passer par les élites contestées.

Recomposer sans rompre

Dans cette phase post-électorale, le président devra arbitrer entre loyauté historique et efficacité politique. Le Grand Nord représente près d'un tiers de l'électorat national : s'en détourner serait risqué, mais s'y accrocher sans renouvellement serait suicidaire. La présidentielle 2025 a révélé une fracture, mais aussi une opportunité : celle de refonder l'alliance septentrionale sur des bases nouvelles, plus inclusives et moins clientélistes.

Gontran Eloundou

Analyste Politique

+237 673 933 132

 

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