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Présidentielle 2025 : le Conseil constitutionnel face au contentieux électoral entre légalité, légitimité et résilience démocratique

Ce 22 octobre 2025, le Conseil constitutionnel du Cameroun ouvre une audience publique décisive consacrée au règlement du contentieux électoral lié à la présidentielle du 12 octobre. Au-delà d'un simple rituel institutionnel, ce moment cristallise les tensions politiques, les attentes citoyennes et les fondements juridiques de la République. Analyse socio-anthropologique d'un tournant démocratique.

 Une audience au cœur de la République

À 11h, dans la salle d'audience du Palais des Congrès de Yaoundé, les juges du Conseil constitutionnel entament l'examen des recours électoraux déposés par plusieurs partis politiques. Cette étape, prévue par le Code électoral camerounais, intervient après la publication des résultats provisoires par ELECAM, qui place Paul Biya en tête avec 53,66 % des voix. L'audience publique est une exigence de transparence d' émocratique , inscrite dans la logique de séparation des pouvoirs et de contrôle le juridico-politique du processus électoral.

Le cadre légal du contentieux électoral

Conformément à la loi n°2012/001 du 19 avril 2012 portant Code électoral, les candidats disposent d'un délai de 72 heures après la publication des résultats provisoires pour déposer leurs recours. Le Conseil constitutionnel, organe juridictionnel suprême en matière électorale, a pour mission de trancher ces litiges dans un délai de 15 jours. Les articles 133 à 138 du Code électoral encadrent cette procédure, garantissant aux candidats un droit à la contestation et aux citoyens une forme de justice électorale. Ce mécanisme renforce la légitimité des institutions et la confiance dans l'État de droit.

 Les acteurs et les griefs

Parmi les candidats, le Social Democratic Front (SDF), représenté par Joshua Osih, et Tomaïno Ndam Njoya de l'Union Démocratique Camerounaise (UDC) demandent l'annulation partielle du contrôle dans plusieurs bureaux situés en France. Les chagrins portent sur des irrégularités dans les opérations de vote, des procès-verbaux incomplets ou falsifiés, et des déplacements de bureaux non justifiés. Ces contestations traduisent une volonté de faire valoir le pluralisme politique et de garantir l'équité du scrutin présidentiel 2025. Elles s'inscrivent dans une dynamique de participation citoyenne et de vigilance démocratique, où voix chaque compte et chaque procédure est scrutée.

Une justice électorale sous tension

L'ouverture de cette audience publique intervient dans un climat politique tendu, marqué par des manifestations à Yaoundé et Douala, et des appels à la réforme du système électoral. Le Conseil constitutionnel, présidé par Clément Atangana, est appelé à faire preuve d'indépendance et de rigueur. Son verdict ne sera pas seulement juridique, mais symbolique : il dira si les institutions peuvent répondre aux aspirations populaires sans céder à la pression politique. Le contentieux électoral devient ainsi un révélateur de la maturité démocratique du Cameroun.

La politique et l'anthropologie du pouvoir

Dans une perspective socio-anthropologique, cette séquence électorale illustre les tensions entre légalité et légitimité, entre pouvoir institué et pouvoir contesté. Le Conseil constitutionnel incarne l'autorité régulatrice, mais il est aussi le miroir des rapports de force politique. En République, la légalité ne suffit pas : elle doit être perçue comme juste. Ce moment rappelle que la démocratie n'est pas seulement un cadre juridique, mais une culture politique en construction, fondée sur le débat, la transparence et la reconnaissance des différences.

Une parole citoyenne en quête d'écoute

Les recours déposés ne sont pas seulement des actes juridiques : ce sont des expressions de mécontentement, de frustration et d'espoir. Ils traduisent une volonté de participation active à la vie politique, notamment chez les jeunes et les femmes. Le Conseil constitutionnel, en ouvrant ses portes au public et aux médias, répond à une exigence de visibilité et d'accessibilité. Ce public devient un espace de médiation entre les institutions et les citoyens, entre le droit et la rue, entre le texte et le vécu.

 Impacts et perspectives

Quel que soit le verdict final, cette étape aura des répercussions sur la perception du processus électoral, sur la crédibilité d'ELECAM, et sur la dynamique politique post-électorale. Elle pourrait renforcer la confiance ou accentuer la défiance. Elle pourrait ouvrir la voie à des réformes ou figer les pratiques. En tout état de cause, elle marque un moment de vérité pour la République du Cameroun, où la parole juridique rencontre la parole politique, et où la démocratie se joue dans l'arène institutionnelle.

Conclusion : entre droit et démocratie, un équilibre à construire

L'audience publique du Conseil constitutionnel du 22 octobre 2025 est bien plus qu'une formalité : c'est une scène où se joue l'avenir démocratique du Cameroun. Elle rappelle que la démocratie est un processus, non un acquis. Elle invite à penser le droit comme outil de régulation, mais aussi comme levier de transformation. Et elle montre que dans une République, la légitimité ne se décrète pas : elle se construit, jour après jour, dans le dialogue entre les institutions et les citoyens.

Gontran Eloundou

Analyste politique

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