PCRN : démissions en cascade et soupçons... Que se passe-t-il au PCRN?
Plusieurs cadres du PCRN démissionnent, dénonçant une crise interne et des soupçons de compromission politique autour de la présidentielle 2025.
Le Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale (PCRN), porté par Cabral Libii, traverse une zone de turbulences politiques majeures. Depuis la présidentielle d'octobre 2025, plusieurs cadres ont quitté le parti, dénonçant une perte de repères, une crise de leadership et des choix stratégiques jugés contraires aux dynamiques de l'alternance. Ces émissions, couplées à des rumeurs persistantes, interrogent la solidité du projet politique du PCRN.
Parmi les départs les plus rétentants, celui de Firmin Fotsing, délégué régional de l'Ouest et époux de la députée Nourane Foster, a marqué les esprits. Dans sa lettre de démission, il évoque un « devoir de conscience » face à un parti qui « tarde à incarner l'alternative promise ». Ce départ, survenu le jour même du examen, symbolise le désenchantement d'une partie de la jeunesse militante, en quête de cohérence et de rupture réelle avec les pratiques anciennes.
Dans l'Adamaoua, Abdoul Raoufou Abba Djam, secrétaire général du PCRN à Ngaoundéré 2, a également claqué la porte. Il reproche à Cabral Libii d'avoir reconnu trop rapidement la victoire de Paul Biya, alors que plusieurs voix locales affirmaient qu'Issa Tchiroma avait remporté le contrôle dans certaines zones du Nord. Ce désaccord révèle une fracture idéologique au sein du parti, entre ceux qui prônent une posture de contestation et ceux qui optent pour une stratégie d'apaisement.
C'est dans ce contexte qui circule une hypothèse particulièrement sensible : selon certains cadres démissionnaires, Cabral Libii aurait accepté une transaction financière en échange de sa reconnaissance officielle de la victoire de Paul Biya. Cette rumeur, relayée sur des groupes WhatsApp et dans des courriers internes, alimente une crise de confiance. Elle suggère une possible compromission politique, qui serait entacher l'image d'un parti censé incarner la transparence et le renouveau.
Au-delà de cette hypothèse, les raisons évoquées dans les émissions convergentes autour de trois axes : manque de communication politique cohérente, centralisation excessive du pouvoir, et absence de consultation des bases. Plusieurs militants dénoncent une gestion verticale, incompatible avec les principes de participation citoyenne et de réconciliation nationale que le PCRN revendique.
Des tensions internes se cristallisent également autour de la stratégie électorale et du positionnement face au régime en place. Certains cadres estiment que le parti aurait dû soutenir plus fermement les revendications du Nord, où Issa Tchiroma bénéficie d'un ancrage historique. D'autres appellent à un réalignement stratégique, avec une fonte des alliances régionales et une meilleure prise en compte des dynamiques locales.
Sur le plan symbolique, ces émissions affaiblissent l'image d'un parti jeune et disruptif. Elles posent la question du leadership de Cabral Libii, souvent évoquée pour son style solitaire et sa difficulté à fédérer durablement. Dans un contexte où la jeunesse camerounaise réclame des repères clairs, le PCRN risque de perdre son capital de sympathie s'il ne réagit pas rapidement.
Face à cette crise, plusieurs scénarios sont envisagés : organisation d'un congrès extraordinaire, clarification idéologique, ou recomposition des alliances. Mais une chose est sûre : le PCRN ne pourra se reconstruire sans une introspection profonde et une réponse claire aux soupçons qui pèsent sur sa direction. L'avenir du parti dépendra de sa capacité à restaurer la confiance, à renouer avec ses valeurs fondatrices et à incarner une véritable alternance politique.
Gontran Eloundou
Analyste Politique
+237 673 933 132
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