Washington impose la paix : Tshisekedi, Kagame et Trump la vérité sur la géopolitique économique.
Le 4 décembre 2025, Félix Tshisekedi et Paul Kagame ont signé à Washington, sous la médiation de Donald Trump, un accord de paix présenté comme « historique ». Pourtant, l’absence de poignée de main et le contexte économique et géostratégique révèlent une paix imposée, davantage tournée vers les intérêts américains face à la Chine que vers une réconciliation sincère.

L’accord de paix signé le 4 décembre 2025 à Washington entre Félix Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo, et Paul Kagame, président du Rwanda, sous l’égide de Donald Trump, marque une étape symbolique dans un conflit qui déchire l’Afrique des Grands Lacs depuis plus de deux décennies. Présenté par le président américain comme un « grand miracle », cet accord survient alors que les combats se poursuivent dans l’est de la RDC, notamment contre le groupe armé M23, accusé d’être soutenu par Kigali. L’absence de poignée de main entre les deux protagonistes illustre la fragilité de cette paix, qui ressemble davantage à une paix de brave qu’à une réconciliation sincère.
Le conflit entre la RDC et le Rwanda trouve ses racines dans les suites du génocide de 1994 au Rwanda, qui a provoqué l’afflux massif de réfugiés et de milices dans l’est congolais. Depuis, la région est le théâtre de guerres récurrentes, de l’exploitation illégale des ressources naturelles et de l’ingérence des puissances régionales. Le M23, réapparu en 2021, a intensifié les affrontements, provoquant des déplacements massifs de populations et une crise humanitaire persistante. Les tentatives de médiation, qu’elles soient africaines ou internationales, ont échoué à instaurer une paix durable, en raison de la méfiance entre Kinshasa et Kigali et des enjeux économiques liés aux minerais stratégiques.
L’accord de Washington s’inscrit dans une logique géopolitique plus large. Donald Trump, revenu à la Maison-Blanche, cherche à repositionner les États-Unis en Afrique face à l’influence croissante de la Chine. En imposant ce compromis, il vise à sécuriser les corridors économiques et les ressources minières de la région, indispensables aux industries technologiques mondiales. Le cobalt, le coltan et le lithium congolais sont au cœur de cette stratégie, et la stabilisation apparente du conflit permet aux États-Unis de renforcer leur présence économique et militaire dans les Grands Lacs. Cette paix est donc autant politique que sociale, mais elle est surtout économique, car elle conditionne l’accès aux ressources et la maîtrise des flux commerciaux.
Pour les Africains et les Camerounais, cet accord interroge sur la nature réelle de la paix. Est-ce une victoire diplomatique pour la région ou une manœuvre de repositionnement stratégique des grandes puissances ? L’absence de gestes symboliques entre Tshisekedi et Kagame montre que la méfiance demeure intacte. La paix imposée par Washington pourrait se révéler fragile si elle ne s’accompagne pas d’un véritable dialogue entre les protagonistes et d’une prise en compte des aspirations des populations locales. Elle illustre la manière dont les conflits africains sont souvent instrumentalisés dans les rivalités géopolitiques mondiales, transformant les souffrances des peuples en variables d’ajustement dans les stratégies économiques des puissances.
En définitive, l’accord de Washington est une étape historique, mais il reste à démontrer qu’il s’agit d’une paix durable. Plus qu’un accord sincère, il apparaît comme une paix de circonstance, dictée par les impératifs économiques et stratégiques des États-Unis face à la Chine. Pour l’Afrique, et particulièrement pour les Camerounais qui observent ces dynamiques régionales, il s’agit d’un rappel que la souveraineté et la stabilité ne peuvent être garanties que par une gouvernance locale forte et une volonté réelle de réconciliation, au-delà des pressions extérieures.
Gontran Eloundou
Analyste politique
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