Dans les rues, sur les écrans, dans les groupes WhatsApp, sur les pages facebook et les vidéos TikTok, une fracture s'élargit. Le discours politique au Cameroun glisse dangereusement vers la tribalisation, alimenté par des influenceurs en quête de buzz et de polarisation. Ce glissement n'est pas anodin. Il est toxique, inflammable et profondément destructeur pour le tissu social.

 Les influenceurs, nouveaux faiseurs d'opinion

Aujourd'hui, ce ne sont plus les éditorialistes ou les universitaires qui façonnent l'opinion publique. Ce sont des influenceurs numériques, parfois sans formation politique, mais avec des milliers de followers. Leur parole devient loi, leur indignation devient vérité, leur narration devient mobilisation. Et dans ce tumulte, les identités ethniques sont instrumentalisées, caricaturées, opposées. Des vidéos virales accusent, stigmatisent, généralisent. Des posts Facebook insinuent que tel groupe ethnique est responsable de tel vote, de telle crise, de telle injustice. Le débat démocratique cède la place à la suspicion communautaire.

Silence des dirigeants politiques : une absence coupable

Face à cette dérive, le silence des responsables politiques est assourdissant. Peu d'appels au calme, campagne de sensibilisation, pas de prise de parole pour désamorcer les tensions. Ce vide laisse le champ libre aux discours clivants, aux amalgames, aux rancœurs historiques ravivées. Dans une période post-électorale aussi sensible, l'absence de leadership apaisant est une faute grave. Car ce n'est pas seulement la paix sociale qui vacille, c'est l'unité nationale qui se fissure.

 Une nation en danger

La tribalisation du discours politique n'est pas une opinion. C'est une menace directe à la cohésion nationale, à la démocratie, à la paix. Elle transforme les citoyens en adversaires, les électeurs en ennemis, les débats en conflits. Et pourtant, nous avons le choix. Le choix de refuser les raccourcis ethniques. Le choix de dénoncer les discours haineux. Le choix de rester unis dans la diversité.

 Collectif Appel à la conscience

Ce texte est un appel de détresse. Un cri lancé à tous ceux qui croient encore en un Cameroun pluriel, juste et solidaire. Partagez-le. Discutez-en. Interpellez vos dirigeants. Refusez la haine. Refusez la division. Parce que le tribalisme n'est pas une opinion, c'est une manipulation. Et parce que le silence, face à cette dérive, est une complicité.

Gontran Eloundou

Analyste politique

A lire aussi: 

Cameroun : la réconciliation nationale plus qu’une option, une urgence historique, politique et humaine.